Une balle dans le ventre a t’on rapporté. Acte lâche. Acte imbécile. Acte futile. La mort contre de l’argent.
François n’a pas eu froid aux yeux. Je le sais. François les a regardés droit dans les yeux. C’est sûr. Car François lui, il détestait la lâcheté. Il détestait les abus, la trahison, et plus que tout, la bêtise.
Ils lui ont tiré dans le ventre, a t’on rapporté. François, c’est sûr, ne leur a pas laissé le choix de lui tirer dans le dos.
Cette débâcle macabre, qui continue. Des rats en fuite, mais cela ne suffit toujours pas assurément.
Il est trop tard pour François et pour beaucoup d’autres. Tant d’irresponsables passés à la tête de ce pays. Ils portent sur leur conscience muette, la mort de François et de tous les autres, connus et inconnus, riches ou pauvres, haïtiens ou étrangers, sacrifiés à la bête. Héritage politique mortel. Sinistre récolte sans fin.
Les lâches ont encore frappé. Ils ont tué François.
Avec lui disparait toute une génération d’artistes et d’haïtiens droits et “vanyan”. Nous perdons un homme sans compromis. Un intègre, qui avait réussi à survivre, rongé, torturé, les sentiments à fleur de peau.
Un acteur inégalable, si rarement utilisé, trop grand pour notre pays qui n’a su qu’en faire. Un homme, souvent déçu et blessé, fuyant amateurisme, médiocrité, et plus que tout la « malveillance ». Un homme grand, droit, sincère, entier, modeste, drôle, généreux. Un homme seul aussi, sans place pour ceux comme lui.
Voici le cercle bouclé. Les lâches l’ont achevé. Puisqu’il ne servait à rien dans leur plan de destruction acharné et aveugle. Tout juste pour un morceau de rançon. 100.000 $ pour la vie d’un ami cher. Chiffre ridicule pour la vie d’un être unique et précieux. Mais chiffre obscène surtout, révélant le prix inverse des cerveaux malades et vils des mécréants assassins, qui ont abattu le poète.
Mais poète, Nous ne laisserons pas ta mort sans justice ! Comme pour tous les autres. Un jour nous saurons les noms de tes meurtriers. Les lâches ne gagnent jamais dans la longue histoire des peuples.
À très bientôt donc poète. Nous te saluons. Nous te suivons. Poète nous t’aimons.
Honneur à toi Poète. Et respect.
C’est pour la vie. La mort n’y changera rien.
Raoul Peck 23 Mai 2007
P.S Le cinéaste, qui a fait parvenir ce poème à la rédaction de Radio Kiskeya, avait dirigé François Latour dans son film "L’homme sur les quais", réalisé en 1993.