Mise à jour le 18 décembre
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Jean-Claude Duvalier inculpé en Haïti de corruption et de vol

L’ancien président Jean-Claude Duvalier a été officiellement inculpé mardi par la justice de son pays de corruption, vol et détournement de fonds pendant ses années au pouvoir (1971-1986) à Haïti. Son sort est désormais entre les mains du juge d’instruction", a déclaré à Reuters le procureur général, Aristidas Auguste. "Nous avons déposé une plainte à son encontre".

Il appartiendra désormais au juge d’instruction de décider de poursuivre ou non l’affaire au plan judiciaire.

"Bébé Doc" avait été arrêté dans la journée par la police à l’hôtel de Port-au-Prince où il résidait depuis son arrivée inopinée, dimanche, dans l’île caraïbe.

Un juge accompagné de policiers s’était rendu à l’hôtel où "Bébé Doc", âgé de 59 ans, s’est installé après son retour au pays au terme de 25 ans d’exil en France. L’hôtel, situé à Pétionville, faubourg chic de la capitale, avait été bouclé par des policiers en armes.

Alors qu’il descendait de sa chambre sous bonne escorte et en compagnie de son épouse, "Bébé Doc" a salué les journalistes et les quelques partisans qui s’étaient réunis devant l’hôtel.

Au cri de "Libérez Duvalier !", certains de ses partisans ont couru derrière le véhicule de police dans lequel il a pris place, certains tentant de stopper le convoi en disposant des pneus incendiés sur la route.

Des mouvements de défense des droits de l’homme réclamaient l’arrestation et le jugement de Duvalier qu’ils accusent d’avoir, en quinze ans de pouvoir, tué et torturé des milliers d’opposants.

Selon un membre du gouvernement, une plainte pour détournement d’argent a été réactivée contre l’ancien dictateur et plusieurs autres plaintes émanant de particuliers portant sur "d’autres crimes présumés" sont en préparation.

Le Premier ministre, Jean-Max Bellerive, a reconnu lundi que les autorités haïtiennes n’étaient pas enchantées du retour de Duvalier.

Comme la Constitution proscrit l’exil forcé, l’ancien "président à vie" avait le droit de revenir, a dit le chef du gouvernement, même si son passeport diplomatique délivré en 2005 a expiré. "Si des procédures judiciaires sont engagées à son encontre, alors le système judiciaire fera ce qu’il a à faire", a-t-il ajouté.

EN PLEINE CRISE POLITIQUE

L’ambassadeur de France en Haïti, Didier Le Bret, a formulé l’espoir que Jean-Claude Duvalier repartirait en France dès que possible afin de ne pas perturber un processus électoral déjà contesté par une partie de la population.

A Washington, le département d’Etat a estimé que le retour de "Bébé Doc" compliquait la tâche du gouvernement haïtien. "Le retour au pays d’un ancien dictateur ne fait qu’aggraver le fardeau actuel de l’île", a commenté P.J. Crowley, son porte-parole. "Ce qui se passe à partir de maintenant est du ressort du peuple haïtien, (...) pas du nôtre".

Prié de dire s’il redoutait que l’arrestation de Duvalier n’aggrave la situation, le porte-parole de la diplomatie américaine a répondu : "Naturellement. Le fait qu’il débarque au plein milieu d’une situation très difficile et délicate (...) ne fait que compliquer les choses".

Pour les observateurs, le retour de "Bébé Doc" risque de compliquer la situation politique en Haïti, où la tension est vive depuis le premier tour de la présidentielle, le 28 novembre.

Les résultats du premier tour, dont l’annonce a été suivie d’émeutes, donnent en tête Mirlande Manigat, devançant de peu Jude Célestin, candidat soutenu par le président sortant René Préval.

Les experts de l’Organisation des Etats américains (OEA) préconisent, sur la foi d’irrégularités "importantes" dans le décompte des voix, que Célestin soit disqualifié et remplacé au second tour par le candidat arrivé troisième, le chanteur populaire Michel Martelly.

"Bébé Doc" avait accédé au pouvoir en 1971 à la mort de son père François Duvalier, alias "Papa Doc", devenant à 19 ans le plus jeune chef d’Etat au monde. Proclamé "président à vie", il a dirigé le pays jusqu’à son départ en exil en France en février 1986, à la suite d’un soulèvement populaire.

"Les violations importantes et systématiques des droits de l’homme commises en Haïti pendant l’ère Duvalier équivalent à des crimes contre l’humanité", a déclaré Javier Zuniga, conseiller spécial d’Amnesty International.




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