Mise à jour le Février 2022
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Jeudi 28 mars 2024 15:44 (Paris)

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Les enfants du paradis…

Le faible pourcentage de réussite aux examens officiels de fin d’études secondaires ne devrait pas constituer une surprise. On connaît les dysfonctionnements d’un système scolaire aux visées élitaires, dont la clientèle s’est massifiée au fil des temps. On sait aussi qu’aucun gouvernement n’a fait de l’éducation une vraie priorité. Elle a été traitée comme une chose parmi d’autres, et toutes les actions se sont inscrites dans une sorte de continuité, comme si on était dans une normalité. Or, d’un point de vue républicain, il est anormal que la scolarité ne soit pas universelle, il est anormal que l’enseignement de base soit payant, il est anormal que l’Etat exerce si peu de contrôle sur le contenu et la qualité de l’enseignement. Au terminus du parcours d’un système déréglé qui se porte très mal, peut on s’attendre à des résultats qui ne traduisent pas la réalité d’un échec permanent ?

Par LYONEL TROUILLOT

Mais il n’y a pas que cela. A côté des problèmes propres au système et de l’absence de volonté politique de faire de l’éducation une priorité, il y a les effets de la réalité extérieure sur le système. Aujourd’hui,, il y a l’évidence que le savoir n’est pas (n’est plus ?) une marque de prestige, un idéal. La médiocrité, la ruse, l’astuce, la magouille sont payantes. A quoi cela sert-il de savoir ? Les micros, les affaires, le pouvoir sont ouverts à tous, indépendamment du niveau de connaissance. N’importe qui peut être et faire n’importe quoi, occuper n’importe quel poste. Dans tous les domaines, ce pays produit quelquefois d’étranges vedettes, et l’on comprend le jeune qui se dit : si untel peut occuper tel poste, si untel peut se débrouiller si bien, pourquoi pas moi ?

Il y a aussi le fait que l’attitude des familles (d’autres diraient des classes) les plus riches n’aide en rien à redonner confiance à l’éducation haïtienne. Le choix systématique de ces familles est de placer leurs enfants en dehors du système scolaire haïtien. Viendra-t-il le temps où s’opposeront ceux qui ont été formés par le système haïtien et ceux qui en Haïti même ou ailleurs ont été formés en dehors du système haïtien et dans le mépris de ce système ? L’éducation scolaire ne produit pas un savoir neutre, elle est un élément essentiel de la socialisation, de l’éveil à la citoyenneté. Au sommet de l’échelle sociale, ce pays risque de produire des extraterrestres aliénés, éduqués objectivement dans l’affirmation d’une différence par rapport aux autres, d’une non camaraderie objective avec leurs congénères. Ce choix de classe ne contribue en rien à l’intégration ni au renforcement du système national. Et quand on considère les sommes que coûtent la formation scolaire dans les écoles « non haïtiennes », on se dit qu’avec cet argent on aurait pu créer de « bonnes » écoles qui auraient pu servir d’exemples, voire de modèles, contribué d’une manière ou d’une autre à l’amélioration du niveau du système scolaire haïtien.

En Haïti, quel que soit le système choisi, tous les enfants apprennent peu. Les uns peuvent cependant apprendre à être le moins haïtien que possible, sans une miraculeuse supervision parentale. Les autres apprennent à apprendre peu dans le système haïtien, pour s’empresser de lutter contre la précarité qui les menace. Dans les deux lots, il faut rendre hommage aux miraculés qui sentent un vrai besoin d’apprendre et parviennent à développer une conscience citoyenne.




BÔ KAY NOU


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