Ce thème a été abordé par deux panélistes : un représentant de la Direction des Archives Nationales, Salnave Exantus, et le journaliste Henri Alphonse.
Le non-acheminement de nombreux registres aux Archives Nationales et la fabrication de faux documents d’Etat Civil (actes de naissance, de mariage, extraits d’archives) pénalisent les migrants-es haïtiens qui sollicitent ces documents dans leur pays, selon M. Exantus.
Il précise qu’aux termes de la loi du 20 août 1974, les registres doivent être transmis par les offices d’Etat Civil, entre le 1er janvier et le 10 février de chaque année mais cette disposition n’est pas respectée. Maints citoyens-citoyennes ici et ailleurs, se retrouvent alors dans l’impossibilité d’obtenir un extrait des archives et doivent recourir à des procédures judicaires coûteuses quand ils/elles doivent effectuer certaines démarches.
Pour sa part, le journaliste Henri Alphonse, a souligné l’étendue et la diversité constatées au sein de la diaspora haïtienne, quant aux difficultés liées à l’accès à la documentation.
En Guyane française, des Haïtiens-Haïtiennes en situation irrégulière, craignant l’arrestation et la déportation, limitent leurs déplacements à l’extrême et vivent dans la clandestinité. Ils/elles sont nombreux à ne pas pouvoir approcher le seuil du Consulat haïtien en Guyane, car pour y arriver, il leur faut franchir un pont gardé par des policiers qui vérifient les papiers d’identité et procèdent souvent à l’arrestation immédiate de ces migrants-es aux fins de déportation.
M. Alphonse a rappelé que les sollicitations d’actes d’Etat Civil aux Archives Nationales d’Haïti, en vue de compléter certaines formalités exigées dans les territoires français revêtent une importance cruciale pour les ressortissants-es haïtiens. « Chaque jour qui passe, sans l’arrivée des papiers sollicités, rapproche le/la migrant-e de l’expulsion », souligne le journaliste.
En République Dominicaine, la question de la documentation est compliquée à la fois pour les citoyens-nes haïtiens et leurs descendants nés sur ce territoire. Un nombre important de migrants de longue date ne disposent guère de documents d’identité délivrés par les autorités haïtiennes. Quant à ceux et celles de leurs descendants qui ont pu, non sans difficulté, obtenir la nationalité dominicaine en vertu du jus soli tel que prescrit pendant longtemps dans la Constitution de ce pays, ils/elles sont actuellement menacés de dénationalisation.
En ce qui a trait à l’exercice du droit de vote aux diverses élections tenues en Haïti, toutes les communautés de la diaspora en sont exclues depuis plus de 22 ans. En effet, l’entrée en vigueur de la Constitution de 1987 n’a pas été suivie de la mise en place de mécanismes pour recueillir les votes des membres de la diaspora.
Au cours de son exposé, le journaliste Henri Alphonse a suggéré l’établissement d’une structure au sein des Archives Nationales pour un suivi et un traitement en urgence des demandes d’actes d’Etat Civil produites par les Haïtiens-Haïtiennes vivant à l’étranger.
Cette matinée de réflexion autour de la problématique de l’identification des migrants-es haïtiens a fait salle comble au siège du Sant Pon Ayiti à Port-au-Prince. Outre les membres de la Presse, on pouvait remarquer des représentants de diverses institutions étatiques, internationales et privées telles l’Office National d’Identification (ONI), le Ministère des Affaires Etrangères, le représentant du Dialogue Haïtiano-Dominicain des Eglises, des représentants de Droits et Démocratie en Haïti, des membres d’organisation de Droits Humains et du Collectif d’Alliés du GARR pour la Réforme de l’Etat Civil.
D’autres activités marquant la célébration de la Journée Internationale des Migrants sont prévues le 18 décembre, dès 4 heures de l’après-midi, devant l’annexe du GARR à la Première Rue Rivière, à Port-au-Prince.
Port-au-Prince, 17 décembre 2009
Lisane André
Responsable Section Communication et Plaidoyer GARR