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La région caraïbe, ses caractères, atouts et enjeux d’une identité plurielle changeante

par Mirlande MANIGAT

Conférence prononcée à l’occasion de l’ouverture de la 4ème réunion de la CORPUCA (Conférence des Recteurs et Présidents des Universités de la Caraïbe), au Karibe Convention Center, le jeudi 29 juin 2006.

Mesdames et Messieurs,
Vous me permettrez de placer cette conférence dans la perspective d’une fructueuse combinaison d’opportunités, chacune d’elles étant naturellement chargée de virtualités autonomes qui retiennent l’attention, mais, en la circonstance, elles se trouvent enrichies dans et par une association féconde.

Opportunité créée par l’occasion, d’abord. En effet, celle qui nous rassemble aujourd’hui est une activité académique, ce qui nous incite à nous rappeler que la fonction de l’Université et même sa raison d’être la plus stimulante, est de poser des questions judicieuses, d’avancer les hypothèses les plus audacieuses, d’ouvrir des pistes inédites de réflexion, trouver des solutions judicieuses et fonctionnelles et cela, avec liberté, sérieux et en ayant à l’esprit la recherche de l’excellence, les trois conditions du travail utile.

Opportunité régionale ensuite. Cette activité se déroule dans un cadre caraibéen, même si toutes les unités composantes de notre univers ne sont pas présentes ; mais nous avons le bonheur de réunir ici, des échantillons représentatifs de cette zone une et diverse, et nous chérissons l’ambition que le succès de cette rencontre sera porté au crédit de la région toute entière, comme une contribution à la réalisation de cet idéal de compréhension mutuelle, de solidarité et de complémentarité pour lequel tant de penseurs et hommes politiques ont œuvré, hier comme aujourd’hui.

Opportunité offerte par la langue, en troisième lieu. En saluant nos amis hispanophones venus de la République Dominicaine et de Cuba, et anglophones représentant la University of the West Indies qui nous avait si généreusement accueillis pendant 4 ans, mon époux et moi, je prends plaisir à rappeler que tant l’Organisation Internationale de la Francophonie, institution mère, que l’Agence Universitaire de la Francophonie qui patronne nos activités du jour ont bien pour mission l’extension de l’usage du Français, mais elles témoignent aussi, par leur politique d’ouverture, de tolérance et d’expansion, que le Français est une langue de partage, qu’on peut penser en Français et traduire ses réflexions dans une autre langue ; on peut tout aussi passer par le Français, n’est-ce pas, pour communiquer dans toutes les langues, surtout celles d’origine latine.

Enfin, vous comprendrez le plaisir que j’éprouve à souligner l’opportunité du lieu : il est juste et flatteur que la quatrième réunion de la CORPUCA et le lancement académique de l’IFGCar se déroulent en Haiti qui remplit ainsi, l’espace d’un moment, le rôle de capitale de la Francophonie. Il est gratifiant de rappeler qu’Haiti, à cause de l’exemplarité de sa double révolution sociale (fin de l’esclavage) et politique (l’indépendance conquise en 1803), et qui a représenté, à l’orée du 19ème siècle, « une anomalie, un défi, une menace », selon la belle trilogie synthétique et appréciative de l’historien américain Rayford Logan, a servi de phare pour l’Amérique latine encore non émancipée, et la geste de ses dirigeants a inspiré le trinidadien C.L.R. James et son magnifique ouvrage Les jacobins noirs, dédié à ses héros, forgeurs de destinée, le Martiniquais Aimé Césaire dans son chef-d’œuvre théâtral La Tragédie du Roi Christophe, le romancier cubain Alejo Carpentier qui nous a légué El Reino de este Mundo, les deux prestigieux auteurs fascinés par ce personnage exceptionnel et controversé que fut le Roi Henri Christophe. En cette année dédiée au grand poète et homme d’Etat Léopold Sédar Senghor, nous sommes heureux de souligner sa reconnaissance de la paternité de la négritude à Jean Price Mars et son propos, classique et connu, mérite toutefois d’être reproduit :

« Il est des noms qui sonnent comme un manifeste. Tel me fut révélé le nom du Dr. Jean Price Mars... Je lus Ainsi par l’Oncle d’un trait, comme on boit l’eau de la citerne, au soir, après une longue étape dans le désert.... Me montrant les trésors de la négritude qu’il avait découverts sur et dans la terre haitienne, il m’apprenait à découvrir les mêmes valeurs mais vierges sur et dans la terre d’Afrique ».

Une circonstance académique, une région creuset de civilisation, un prétexte linguistique, un lieu berceau de libertés, tels sont donc les ingrédients dont l’articulation fait de ce jour un moment symbolique. Il s’agit bien d’une rencontre, au sens baudelairien du terme, c’est-à-dire un mouvement de l’un vers l’autre pour une reconnaissance et une appréciation mutuelles, et le sujet choisi synthétise ces différentes opportunités en une corrélation dynamique et prometteuse, car il pose la question de la complexité de cette quête d’identité en évoquant une pluralité d’éléments liés à une problématique centrale condensée en trois questions :

Qu’est-ce que la Caraïbe, objet de notre attention et cadre de notre vie ?
Quel est le contenu pluriel de cette identité qui se dégage de la réalité régionale ?

Pouvons-nous parler d’une culture caraïbe aux diverses facettes ?

Ces interrogations de base prennent leur sens et leur relief lorsqu’on les replace dans la dynamique évolutive de cette réalité en faisant intervenir le poids de l’histoire, source et clef d’explication des changements.

Une dotation géographique immuable

On ne saurait aborder la question complexe de l’identité de la région de manière aérienne, comme en un survol rapide. En effet, le cadre de gestation, de déploiement et de transformation de cette identité est géographique, un socle qui lui a servi de creuset incomparable avec ses caractéristiques incommunicables. On parle de la région caraïbe comme on évoque la zone des Balkans. Il y a bien, circonscrite sur la carte du monde, une région définie en termes géographiques. Deux grands géographes européens, Alexander Von Humbolt et Elisée Reclus ont bien identifié cette Méditerranée américaine, à côté de l’originelle européenne et d’une autre asiatique. Le géopoliticien Yves Lacoste, fondateur il y a tout juste 30 ans de la prestigieuse revue Herodote, au moment où le terme géopolitique récupérait un légitime droit de cité dans les cercles universitaires après avoir été dévoyé par le nazisme hitlérien, reprenant la vision d’une mer entre deux mondes, en l’occurrence les deux masses septentrionale et méridionale du continent américain, a fait observer qu’une Méditerranée, ce n’est pas seulement une mer entre deux continents, ce peut être aussi une mer entourée de nombreuses terres et de nombreux pays ».

De fait, si l’asiatique rassemble 11 nations, l’européenne 18, la Méditerranée caraibe qui nous intéresse est enserrée par 25 unités.

Un vieux débat classique et toujours stimulant anime et enrichit de nombreuses rencontres universitaires, et il n’est pas sans intérêt d’en rappeler les lignes de force, sans toutefois pouvoir les détailler.

Une première conception de la Caraïbe, étroite et contestée, est la vision West Indian, celle des anciennes colonies du Royaume Uni. Elle a servi de base à la création de la Fédération des Indes Occidentales en 1958, comme une voie réaliste vers l’indépendance dans un cadre unitaire. Après l’échec de cette première expérience d’intégration institutionnelle par le haut, suivie de la cascade des émancipations individuelles à partir de 1962, elle a justifié la création de la CARIFTA, zone de libre échange en 1968, puis de la CARICOM coiffant la Communauté de nature politique et le Marché Commun en 1974, alors que déjà la dynamique de l’intégration régionale avait suscité un intérêt au-delà des frontières de l’institution, les rendant virtuellement obsolètes : en effet, avant même la mise en œuvre du Traité de Chaguaramas en juillet 1974, Haiti avait formellement sollicité son adhésion : ses voisins, pris de court, lui accorderont un strapontin en 1981 avant de l’admettre finalement, en juillet 1997, à la Communauté et, deux ans plus tard, au Marché Commun.

Haïti jouissait bien de l’avantage de l’éligibilité insulaire et l’attitude conservatoire de ses voisins, il faut le souligner, obéissait à des raisons liées en particulier à la taille de sa population supérieure à celles de tous les membres de la CARICOM réunis, au caractère dictatorial du régime d’alors qui contrastait avec le système de Westminster d’origine britannique et acclimaté dans les îles, et au degré de son sous-développement, trois facteurs dissuasifs, à leurs yeux et à l’époque, pour une admission pleine et entière.

Simultanément, une autre vision de la Caraïbe retenait l’attention, celle de toutes les îles qui, de Cuba à Trinidad, en rattrapant les quelques 700 îles et îlots de l’Archipel des Bahamas, s’étirent en un arc de cercle presque parfait et servent de frontière naturelle entre la mer des Caraïbes et l’Océan Atlantique. Résultat multimillénaire d’un ébranlement sismique, ce chapelet d’unités, lilliputiennes pour la plupart, atteste que dans cette partie du monde, la nature a forgé un ensemble doté de la même composante géologique, exposé à des mouvements telluriques, aux volcans simplement assoupis, aux tremblements de terre et à la tourmente saisonnière des cyclones qui le ravagent entre juin et novembre. Elles ont donc en partage, en dehors de la forme, ces destins aux effets souvent meurtriers, mais aussi la trilogie séduisante mer sable soleil qui enchante les touristes.

Dans cet univers, des distinctions se sont toutefois imposées, particulièrement dans la mentalité collective, entre les Grandes Antilles (Cuba, l’île d’Haïti, la Jamaïque et Porto Rico) et les Petites Antilles (les iles du Vent et les iles sous le Vent) ; et si le regard externe leur attribue une commune petitesse, la perception intra régionale est plutôt relative : on est le plus grand (Cuba) ou le plus petit (Montserrat) ; on est aussi plus grand ou plus petit qu’un voisin immédiat. Dans cet univers affecté par la dialectique de la proximité et de la distance, les différences de taille retiennent leur force comparative et leur capacité de différentiation psychologique. On prête aux Jamaïcains une vision qui les porterait à répéter qu’il y a deux West Indies, la Jamaïque d’une part et les « autres ». Cette attitude d’arrogante supériorité physique fut une des raisons de l’antagonisme qui a caractérisé les relations tendues entre cette île et Trinidad qui s’enorgueillit toutefois d’être la plus riche des unités du groupe.

Cette conception ne jouit pas d’une retenue satisfaisante et durable, non seulement en raison de la diversité des unités composantes, mais surtout parce qu’elle implique une double exclusion. D’une part, celle de Belize logée à l’extrême pointe de l’Amérique Centrale et celle de la Guyana blottie entre le Venezuela et Surinam sur le continent sud-américain, les deux dotés d’une personnalité anglo-caraibéenne dans un univers largement hispanophone et même ibérique si l’on tient compte du voisinage de l’imposant Brésil lusophone. Par ailleurs, elle ne tient pas compte des îles qui ne sont pas encore indépendantes, les Antilles hollandaises, Porto Rico, les Iles Vierges britanniques et américaines, la Martinique et la Guadeloupe. L’approche géopolitique du traitement différencié des îles, fondé sur la balkanisation historique du fait de la pénétration européenne qui leur a forgé des destins individuels, rend anachronique une perception exclusivement ou prioritairement insulaire de la Caraïbe.

Enfin, une troisième approche correspond à l’orthodoxie de la logique et du raisonnement géographique qui place la mer au cœur de l’identité physique de la région, une véritable mer fermée de 2.750 000Km2 : c’est l’élément fondamental de contacts, autour duquel les Etats se regroupent, du Nord au Sud, en quatre catégories :
le sud des Etats-Unis, particulièrement l’état de Floride si présent et actif dans la problématique des rapports du géant américain avec ses voisins ; le Mexique dont le Yucatan, en délimitant le golfe éponyme, sert de limite nord-ouest à la région ;
les 7 nations de l’Amérique Centrale : Guatemala et sa voisine orientale de Belize, le Honduras, Salvador, Nicaragua, Costa Rica et Panama qui abrite le canal interocéanique ; au sud les deux pays sud-américains, la Colombie et le Venezuela ; géographiquement, la bordure méridionale de la mer s’arrête avant les trois Guyanes, successivement Guyana, la Guyane hollandaise appelée Surinam et la Guyane française, un peu à l’est de l’embouchure de l’Orénoque, le grand fleuve du Venezuela et le détroit Bouche du dragon entre ce dernier et Trinidad ; mais la géopolitique bouscule dans ce cas la logique physique pour englober ces unités sud-américaines ; enfin les îles déjà présentes, qui forment la frontière orientale du Bassin, de Trinidad vers la septentrionale Cuba.

C’est la conception la plus cohérente mais elle est chargée de virtualités problématiques. En premier lieu, elle forge une gamme de comportements déployée dans le rapport entre la localisation passive, l’appartenance consciente et l’identité vécue, les trois attitudes possibles, assumées de manière à la fois commune et soumise au choix préférentiel des Etats, parfois dans une succession chronologique. Par exemple, le Venezuela dispose de ce seul poumon maritime pour ses échanges et surtout l’exportation du pétrole, mais il subit deux autres attractions, l’andine vers le sud-ouest et l’orinico-amazonienne sur son flanc méridional oriental. Il peut ainsi jouer, de manière prioritaire, complémentaire ou alternative selon les conjonctures et la perception de ses intérêts.

Les pays de l’Amérique Centrale ont deux façades, la caraïbe et la pacifique, même si la distance qui les sépare des plus proches entités insulaires de l’immense océan commande une option réaliste en faveur du voisinage et de l’utilisation de la mer des Antilles.

Les habitants des iles savent, pour leur part, malgré leur petitesse, que leur territoire et plus précisément leurs plages présentent des caractéristiques différentes selon qu’elles bordent la tranquille et accueillante mer ou l’Océan Atlantique plus tourmenté. La Constitution haïtienne de 1987 a innové en stipulant dans son Article 8 que la République est limitée à l’est par la République dominicaine, au nord par l’Océan Atlantique et à l’ouest par la mer des Caraïbes ou mer des Antilles. C’est la première de nos 22 Constitutions à édicter une localisation aussi précise.

De ce fait, l’extension géographique de l’espace crée des conditions naturelles permissives, maximalistes à défaut d’être optimales, pour la recherche et la construction d’une identité fondée sur des bases stables ; mais il convient de relativiser la tentation d’une sorte de déterminisme géographique, en rappelant la mise en garde de l’historien français de l’Ecole des Annales, Lucien Febvre, édictée en ces termes brefs mais significatifs : des nécessités, nulle part, des possibilités partout.

En d’autres termes, la nature invite mais elle ne commande pas ; elle offre et justifie un appel à l’unité ou au moins à la solidarité, comme pour parler d’une vocation de l’Europe à forger l’une et l’autre, mais les réponses sont pétrifiées dans des réalisations qui font intervenir d’autres considérations. Mais si l’on veut poursuivre la comparaison avec l’Europe, il faudrait souligner, qu’en termes géographiques, les frontières de la région caraïbe sont circonscrites de manière définitive, car si l’Europe dispose de limites maritimes au Nord, à l’Ouest et au Sud, elle a progressivement repoussé celles de l’Est, dans une marche dictée par la dynamique de l’intégration, sans qu’il soit permis d’anticiper jusqu’où elles s’arrêteront. On pourrait poursuivre le parallèle en disant que, du point de vue géographique, un pays est caraïbe par nature et par position, mais qu’en dehors des six fondateurs et des dix-neuf accueillis lors des cinq vagues d’élargissement, une nation est géopolitiquement européenne par choix et par réceptivité de l’Union Européenne.

Cette conception de la région caraïbe organisée autour de la mer du même nom offre l’avantage, sans doute encore plus théorique que fonctionnelle, d’épuiser les possibilités offertes par la nature, même si elle n’empêche pas des ostracismes individuels : on se souvient du mot lapidaire du Premier Ministre de Trinidad Eric Williams « Si le Venezuela fait partie de la Caraïbe, pourquoi ne pas inclure la Tierra del fuego ! ». Cet interdit fut émis au moment même où ce pays développait une politique de rapprochement avec ses voisins, particulièrement sous la forme d’une assistance pétrolière élaborée dans le Protocole de San José signé en 1980 avec le Mexique en faveur de 11 pays de l’Amérique Centrale et de la Caraibe, et récemment réanimé dans le cadre du Programme Petrocaribe lancé par le Président Hugo Chavez.

Des destins introduits par l’Histoire

Dans cet univers, les hommes ont forgé des identités culturelles variées exprimées d’abord en termes de langues, de traditions, d’habitudes et de mémoires collectives différentes. En effet, on retrouve une caraïbe de culture francophone, une hispanophone majoritaire, une anglophone et une hollandophone ; cette tour de Babel réduite ne voit pas les barrières linguistiques estompées par l’usage du créole, totalement en Haïti, partiellement dans d’autres îles, et l’éloge de la créolité entrepris par nos amis martiniquais ne suffit pas pour faire de cette langue un facteur d’unité, malgré la détermination de ses vaillants promoteurs. Par ailleurs, ces dotations, séquelles enracinées de l’histoire de la colonisation, cohabitent avec l’anglais, en raison de l’influence de cette langue dans les affaires et surtout à cause de l’émigration de plus en plus massive des caraïbéens vers les Etats-Unis. A cela s’ajoute la capacité de pénétration et de séduction de l’American way of life, mais les effets sont encore trop superficiels pour servir de facteur de cohésion ou même de rapprochement.

Le peuplement en Amérique Centrale, en Colombie, au Venezuela est à dominante hispanique créant un lien entre eux, au nom de l’hispanidad auquel adhèrent aussi Cuba et la République Dominicaine. Le fond originel amérindien s’impose fortement au Mexique par exemple, il a disparu dans la plupart des iles sauf dans les Manuels d’histoire qui enseignent qu’avant l’arrivée de Christophe Colomb, elles étaient peuplées par des hommes ayant une civilisation et un mode de vie anéantis par la pénétration européenne ; et il a survécu dans un état résiduel au Venezuela.

Les pays hispanophones offrent, par ailleurs, une situation de métissage entre trois races, la précolombienne, la blanche et la noire, en un dosage qui varie d’un pays à l’autre, et la valorisation des cultures comme la place occupée par les différents groupes subissent les effets de préjugés qui placent ces derniers sur une échelle de préférence qui va de l’indifférence, voire le mépris à la blancolâtrie. On aime bien répéter que la population n’est pas blanche mais cafe con leche ; mais le rêve avoué ou inconscient est de renforcer la part de lait.

Les îles non hispaniques affichent un autre type de peuplement où l’on retrouve l’élément noir d’origine africaine. Cette dominante campe en situation prioritaire en Haïti, et relative dans les îles anglophones qui comptent des apports venus d’Asie (particulièrement des Indiens amenés par les Anglais après l’abolition de l’esclavage et aussi des Chinois), et plus récemment du Moyen Orient (Syriens et Libanais). Il ne s’agit pas de « melting pot » selon la vision ethnologique idéaliste que l’on projette des Etats Unis, mais plutôt de juxtaposition culturelle, avec même une tendance vers une répartition des activités, moins nette qu’autrefois, mais toujours sensible, créant des situations non exemptes de tensions.

Ici intervient la notion de pouvoirs détenus à l’intérieur des sociétés, selon des lignes de clivage dont les plus opérationnelles sont la politique et l’économique sur fond d’accessibilité différenciée à l’éducation d’une part, au commandement économique de l’autre. La vision traditionnelle de Trinidad, par exemple, révélait que les noirs exerçaient le pouvoir politique et les Indiens conquéraient progressivement les leviers économiques, en processus d’émulation et même de rivalité avec les blancs et les Syro-libanais. Ce partage des rôles a changé depuis quelques années et les mutations sociales révèlent une organisation sociale plus complexe.

La présence de la composante noire pose le problème des rapports avec l’Afrique et, plus précisément, elle force le regard porté par les peuples caraïbes sur le continent originel et sur cette tragédie qu’a été la traite esclavagiste. Nous devons à la députée guyanaise Christiane Taubira d’avoir obtenu que l’Assemblée Nationale française la reconnaissance officielle que celle-ci est un génocide et le 10 mai est désormais retenu en France pour en commémorer le sens. Chaque pays, dans la formation de son identité propre, utilise cette filiation acclimatée par trois siècles de séparation, mais dont le souvenir demeure dans les tièdes replis de la mémoire collective qui en assume l’héritage ou se distance de ses séquelles. En Haiti, par exemple, à cause de l’indépendance arrachée très tôt, le regard et l’attitude à l’égard de l’Afrique, volontiers appelée Alma mater, dépendent des moments historiques. Il est bon de rappeler que 6 Constitutions haïtiennes, de 1816 à 1879, avaient prévu d’accorder la nationalité haïtienne aux descendants de noirs et d’indiens qui s’établiraient dans le pays. Si une partie de l’élite était irrésistiblement tournée vers l’Europe, source de savoir et de culture, des écrivains ont revendiqué un comportement différent : un Jean Price Mars a forgé la doctrine de la négritude pour magnifier l’apport de l’Afrique dans la formation de la culture nationale ; et nul mieux que le grand poète Léon Laleau n’a exprimé la dualité culturelle qui caractérise le pays, à travers ces beaux vers que je ne me lasse pas de reproduire et qui, l’an dernier, avaient ému le Président Abdou Diouf, Secrétaire Général de l’Organisation Internationale de la Francophonie, lors de sa visite en Haïti :

Sentez-vous cette souffrance

Ce désespoir à nul autre égal

D’apprivoiser avec des mots de France

Ce cœur qui m’est venu du Sénégal

Catholicisme, protestantisme aux multiples églises, syncrétisme à dominante vaudou en Haïti, santeria à Cuba cohabitent dans de nombreux pays de la région et contribuent à lui donner un caractère cultuel multiculturel au niveau des croyances et des pratiques, en un dosage varié selon les pays. A ce fond chrétien, il faut ajouter l’apport plus récent de l’hindouisme et de l’Islam introduits lorsque le Royaume Uni a fait venir de l’Inde des groupes de population pour remplacer les noirs après l’abolition de l’esclavage. Il n’y a pas eu de guerre de religions, tout au plus des tensions épisodiques et il se dégage dans un pays comme Haïti un consensus fait de tolérance même hypocrite, depuis que, par exemple, le vaudou a reçu droit d’existence et de pratique, même si les préjugés dévalorisants sont encore tenaces. A Trinidad, quatre religions sont pratiquées suivant une ligne de partage qui épouse la structure ethnique de la population. Entre les composantes de celle-ci, l’usage de l’anglais d’une part, le carnaval saisonnier de l’autre ont contribué à réduire les effets de différentiation par la race et la religion.

Ainsi, au niveau du peuplement depuis 5 siècles, le facteur externe a donné à la région des caractères identifiés sur la longue durée. A cet égard, il convient de souligner que le processus n’a pas été linéaire mais saccadé, car il s’est produit un phénomène de résistance à l’acculturation. Globalement considérée, la région a vécu une série de chocs venus de l’extérieur, créant à l’intérieur de la zone, des sections de porosité aux influences, d’où qu’elles soient venues, un jeu de réceptivité et de résistance à ces influences, de sorte que le produit fini que nous observons n’est pas le fruit d’une implantation unilatérale mais plurielle. De là le faciès de la région qui a vu se succéder une série de dominantes mais il ne s’est pas produit une substitution absolue de l’une par rapport à l’autre, la nouvelle venue chassant l’autre, mais plutôt un phénomène d’emboîtement, un chevauchement et non une mutation complète. Dans la Caraïbe anglaise, par exemple, on retrouve des séquelles toponymiques et linguistiques du passage de la France, et les régions frontalières d’Haïti sont poreuses au parler et aux habitudes de la République Dominicaine.

La problématique de l’identité culturelle commune

De ce fait, existe-t-il une identité culturelle caraïbéenne ? La production artistique, par exemple, est-elle un facteur et un critère d’uniformisation ? L’art caraïbe n’est pas la somme des réalisations créant un patrimoine traduit en termes de volume et de qualité (le nombre de publications, par exemple et leur rayonnement). Il s’est produit un phénomène d’appréciation, d’imitation, d’appropriation et même d’osmose dans certains cas. On peut retrouver des notes et un rythme communs à la musique cubaine, la salsa vénézuélienne, la meringue dominicaine, le compas haïtien, comme des rameaux musicaux issus de la même sève originelle. La musique haïtienne a inspiré le renouvellement des tons martiniquais admirablement représentés par l’ensemble Kasav très populaire dans la région, dans la diaspora caraïbe à l’étranger et jusqu’en Afrique.

L’art sous toutes ses formes, présente un caractère universel accessible à tous quelque soit la nationalité et l’appartenance culturelle originelle. Mais la fécondité de la création artistique ne se réalise qu’à l’intérieur d’une ambiance géographique, sentimentale et même existentielle, un lieu à la fois concret et spirituel capable d’inspirer un auteur. C’est là tout le secret de l’alchimie de la production artistique, de ce rapport intime entre un auteur et son milieu qu’il transforme en musique, en peinture ou en roman et qu’il transmet au monde et d’abord à son univers propre. De ce fait, il est possible de concevoir, par exemple, une littérature caraïbe exprimée en français, totalement en créole comme par l’haïtien Franketienne et son Dezafi, ou en un Français mêlé d’un parler créole introduit par doses homéopathiques et savoureuses, une forme pratiquée par Jacques Roumain dans son roman universellement connu Gouverneurs de la rosée, et par Patrick Chamoiseau dans son Texaco (1992). Ce qui compte, quelque soit la forme artistique choisie, c’est l’inspiration authentiquement locale, une géographie de la pensée et des sentiments surgie de l’influence d’un quartier, une ville, un pays ou la région toute entière, et la capacité d’une œuvre de transcender l’incubation première pour atteindre l’universel.

Le poids du facteur économique

Sur le plan économique, la région s’est vue imposer la première expérience de développement de type capitaliste, fondée sur l’esclavage, la monoculture où dominaient des produits tels que le sucre, le café, le coton et l’indigo, le système de l’exclusif. Devenus indépendants, les pays ont cherché à diversifier leur économie et leurs relations avec le monde extérieur, les plus favorisés étant le Venezuela et Trinidad à cause du pétrole. Les économistes de la région nous renseignent de manière constante et stimulante sur les réalisations engrangées, et la marque dominante est ce que nos amis anglophones appellent « externally propelled economies », c’est-à-dire des systèmes organisés à partir d’une dynamique externe et dont la production est largement débitrice des exportations, majoritairement orientées vers deux débouchés, les Etats-Unis et l’Europe et, à l’intérieur de ce continent, Londres pour les pays anglophones.

Le résultat d’une telle évolution est double. D’une part, afin de réduire la dépendance externe, les pays ont cherché dans l’intégration régionale, une voie d’organisation et de résistance. Le Marché Commun Centroaméricain n’a toutefois pas réussi à produire les effets escomptés. La CARICOM créée en 1974 avec les 13 nations issues de la colonisation anglaise, a accueilli Haïti et Surinam : elle fonctionne avec des institutions, des principes, mais elle est loin de réaliser les ambitions de ses promoteurs, particulièrement en ce qui concerne le Marché Commun qui doit résoudre l’épineux problème du respect des règles d’origine qui doit qualifier un produit dans le cadre du système de libre échange. Aussi, l’acquis communautaire, pour reprendre une expression en usage dans le cadre de l’intégration européenne, n’est pas encore une accumulation de réalisations successives, avec des résultats exponentiels. L’Association des Etats de la Caraïbe ambitionne de mettre sur pied un système de collaboration rassemblant tous les Etats de la zone, y compris Cuba. La légitimité d’une telle initiative repose sur le fait qu’elle épouse la conception la plus large, celle du Bassin ; à cela il convient d’ajouter que l’inclusion de Cuba est une réponse, sous-régionale significative à l’exclusion de ce pays de l’OEA et du projet de la Zone de Libre Echange de l’Amérique, la ZLEA, qui devrait réunir 34 des 35 nations du continent, de l’Alaska à la Terre de feu. Le Mexique est déjà engagé aux côtés des Etats-Unis et du Canada dans le cadre de l’ALENA et des pays de la région ont signé des accords ponctuels avec le grand voisin du Nord, ce qui neutralise quelque peu l’ambition de certains pays d’aborder la participation éventuelle dans la ZLEA non en ordre dispersé, mais à travers le cadre protecteur des systèmes d’intégration régionale.

Le résultat de l’héritage du système colonial, des efforts individuels et coordonnés des pays est que, sur le plan économique, la région offre des situations on ne peut plus variées. Les critères classiques qui servent à classifier les pays, le PIB d’une part et l’Indice de Développement Humain plus récent, nous indiquent une échelle variée qui va de Haïti, le pays le plus sous-développé de la zone à la Barbade qui caracole en tête des pays indépendants, tandis que les Bermudes, Porto Rico, les Départements d’Outre Mer français affichent un niveau de développement économique et social dû largement à l’assistance extérieure.

De ce fait, le facteur économique comme critère forgeur d’identité doit être utilisé avec prudence dans la mesure où, vu de l’extérieur, il nous indique plutôt une variété de situations rebelles à toute généralisation. En réalité, de ce point de vue, le pluriel s’impose et il est légitime de souligner les efforts entrepris dans le cadre des projets d’intégration pour pallier aux effets de la diversité structurelle, mais en partant de l’observation fondamentale que la recherche d’une identité qui serait commune procède plus de l’ambition unificatrice que du réalisme fonctionnel.

Une géopolitique variable

L’analyse de la géopolitique internationale de la zone placée dans une perspective historique, révèle des entrées multiples, à la fois idéologiques et politiques, qui agissent sur la gestation de l’identité régionale ; elle met en œuvre trois dimensions coordonnées.

La première se réfère aux relations entre les principaux acteurs internationaux et la région, plus précisément aux regards qu’ils portent sur la zone considérée comme un tout, l’appréciation de sa valeur comme position géostratégique, le degré d’intérêt qu’ils lui accordent comme acteur même secondaire, comme enjeu et comme atout.

Grâce à ses possessions dans la région, la France, peut revendiquer le caractère de puissance caraibe avec d’autant plus de légalité que celles-ci sont intégrées à son territoire juridique, extension consacrée par le Droit International Public. Le Royaume Uni et la Hollande peuvent aussi se prévaloir d’un droit de regard à partir des unités résiduelles de leur ancien Empire. En fait, seules la Chine et la Russie ne disposent pas de relais pour leur action internationale dans la région, ce qui ne les empêche pas d’y déployer une activité, autrefois affectée par des considérations de prosélytisme idéologique, actuellement plus conforme aux paramètres classiques de la diplomatie internationale.

La région a enregistré l’introduction des éléments de la guerre froide et Cuba a servi de théâtre consenti pour le déroulement, en octobre 1962, de la seule crise sérieuse avec des possibilités belligènes avec risque atomique de l’après-guerre. La région toute entière a été hissée au niveau d’enjeu entre les deux super-puissances ; mais l’analyse de leur rivalité doit désormais tenir compte de l’évolution des Relations Internationales elles-mêmes. Cuba demeure encore communiste mais d’une part, elle ne peut plus compter comme autrefois sur l’appui inconditionnel, économique et stratégique, de l’Union Soviétique et des démocraties populaires de l’Europe de l’Est, de l’autre les Etats-Unis semblent s’accommoder de sa présence, plus irritante que menaçante, malgré le rapprochement avec le Venezuela du Président Chavez engagé dans une sorte de croisade anti-impérialiste visant les Etats-Unis, qui demeure, à date, plus rhétorique qu’effective.

La deuxième dimension met en jeu les relations entretenues par tel pays comme entité autonome avec telle nation du système international. Relations privilégiées soit par la tradition, soit par l’intérêt plus récent, fruit d‘une appréciation des intérêts réciproques, de la valeur attribuée à chaque nation caraibe, ses atouts, sa disponibilité à servir comme agent, relais ou tête de pont pour une pénétration plus large. Dans ces jeux bilatéraux croisés, l’initiative est certes reconnue aux nations du Nord, mais même petites, celles des Caraibes disposent d’une capacité que souvent elles s’efforcent d’exploiter et d’élargir. Aussi, sur le plan de la dynamique des relations internationales, l’analyse ne saurait se limiter par exemple à la vision de la zone « chasse gardée » des Etats-Unis, une perspective juste et réaliste mais qui devrait être complétée par les relations de chacun des pays avec le grand voisin du Nord. Il est utile de rappeler l’impact du voisinage imposé par la nature, tel qu’exprimé par un Président mexicain : Pauvre Mexique, si loin de Dieu et si près des Etats-Unis ! » comme pour souligner la fatalité et la lucidité d’une attitude qui ne saurait être hostile au voisin du Nord. Dans certains cas exceptionnels, un petit pays peut même s’enorgueillir d’avoir joué un rôle déterminant, sans commune mesure avec son poids et même son intérêt global. Ainsi, à la conférence de Punta del Este du 28 janvier 1962, le vote d’Haiti était déterminant pour obtenir la majorité nécessaire pour exclure Cuba de l’OEA ; les Etats-Unis y ont objectivement mis le prix et le Secrétaire d’Etat américain Dean Rusk a pu inscrire, avec humour, dans sa note de frais du jour :

Petit déjeuner : $ 2,25

Déjeuner avec le chancelier haïtien : $2.800.000

Mis à part ces cas exceptionnels, l’analyse des relations individuelles des pays de la zone avec les grandes puissances prend des formes variées, de la convergence de sensibilités et d’intérêts au suivisme obligé, en passant par toute la gamme de comportements subtils inspirés par la volonté de ne pas trop paraître se soumettre, l’utilisation d’atouts liés à la taille, la disponibilité de matières premières, la nécessité interne d’observer une posture digne et nationaliste.

Enfin, une troisième ligne d’action inclut les relations intra-caraïbes elles-mêmes, entre nations indépendantes et entre lesquelles intervient une dynamique de voisinage faite d’amitiés réelles ou possibles, de rivalités avec des formes et une intensité variables et même des antagonismes limités ou tenaces. Dans la panoplie de ces rapports on doit identifier des moments, même anciens, un rythme d’évolution et des signes de changement. La vision de Ste Lucie plus proche de Londres que de la Martinique n’est plus conforme à la vérité actuelle des relations internationales de l’île anglophone. Au 19ème siècle, Haïti a eu des relations constantes avec la Jamaïque qui a servi de terre d’exil pour de nombreux hommes politiques fuyant les turbulences de leur pays. Il en est de même avec Cuba, déjà au 19ème siècle, au moment où les nationalistes luttaient pour leur indépendance et Antonio Maceo et José Marti, par exemple, avaient visité le pays et l’histoire a enregistré « le coup de foudre réciproque » entre ce dernier et l’homme politique haïtien Anténor Firmin. José Marti et Firmin avaient même conçu, depuis Paris, un projet de Confédération Antilléenne. La reprise des relations diplomatiques entre les deux pays, le 6 février 1996 a mis fin à 24 années de rupture et Cuba fournit à sa voisine une assistance médicale et une expertise dans le domaine de la pêche, et elle accueille des étudiants haïtiens.

Avec la République Dominicaine, les rapports on été plus tourmentés : les deux parties de l’île ont été réunies pendant 22 ans, de 1822 à 1844, à l’appel des Dominicains, sous l’autorité du Président haïtien de l’époque Jean-Pierre Boyer ; après l’indépendance proclamée en 1844, des gouvernements haïtiens ont tenté, par la force, de rétablir le statu quo ante jusqu’à la conclusion de l’accord de reconnaissance mutuelle en 1874 ; depuis lors, les rapports entre les deux nations voisines ont connu des périodes de tensions et même de crise, comme par exemple après le massacre des Haïtiens en 1937 et, actuellement, la volonté officiellement exprimée des deux côtés d’établir des relations de bon voisinage ne dissimulent pas les difficultés nées de l’émigration non contrôlée des travailleurs haïtiens, du traitement qu’ils reçoivent, de l’asymétrie des flux commerciaux à l’avantage des dominicains pour lesquels le marché voisin est le deuxième débouché après les Etats Unis.

Etant donné notre conception du rôle de l’Université, nous nourrissons l’ambition que les milieux académiques de l’ile peuvent et doivent contribuer à la normalisation des relations entre les deux pays, sur des bases lucides et saines, en tenant compte des intérêts des deux parties. Nous devons cet engagement à nos peuples, nous le devons aussi parce que nous sommes ce que nous sommes.

L’environnement international a changé, dans la région comme ailleurs, depuis la débâcle du communisme en Union Soviétique et en Europe de l’Est. Les pays de la Caraïbe semblent avoir épuisé leur réceptivité à l’idéologie marxiste léninisme, ce qui rend désormais obsolète et stérile ce que le Professeur Leslie Manigat a appelé la rencontre entre un castrisme endogène produit des conditions économiques et sociales inégalitaires qui servent de contexte d’incubation naturelle aux idées révolutionnaires et un castrisme exogène animé par la volonté de Cuba de déployer une sorte de devoir international au profit de cette révolution. Il serait sans doute exagéré d’avancer l’hypothèse d’un apaisement idéologique définitif car les situations internes ont évolué mais n’ont pas radicalement changé, ni celle d’une normalisation sous forme d’uniformité qui donnerait à la région une identité commune fondée sur des intérêts convergents dans le domaine international. C’est une affaire d’appréciation individuelle de ces intérêts et des options internationales, de valorisation du cadre caraïbe comme terrain prioritaire ou accessoire de la politique extérieure de chaque Etat. Et dans cette perspective, la prudence commande de ne pas trop avancer une analyse prospective et de rester dans le domaine des probabilités.

Mesdames et Messieurs,
Au terme de cet exposé qui dépasse le temps imparti, nous éprouverons sans doute, vous et moi, un sentiment de frustration, moi pour n’avoir pas eu le temps de développer, compléter, nuancer mes propos, vous parce que, du moins je l’espère, vous auriez aimé en savoir plus. Ma secrète ambition est que j’aurai réussi à vous mettre en appétit sur un sujet fascinant et virtuellement inépuisable. Il me reste donc, en vous remerciant pour votre écoute, à souhaiter l’éclosion d’une autre opportunité, une autre occasion propice, sous le patronage de l’OIF et de l’AUF, et ... pourquoi pas ? encore en Haïti.




BÔ KAY NOU


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