Le 26 octobre dernier, lors du lancement officiel du CD à teneur forte créole au spectrum de Montréal, le chanteur et moi avons ouvert une causerie entre compatriotes en dépit du temps chrono que son discipliné et distingué gérant nous avait alloué. Au cours de notre conversation intime, je lui ai tendu la pochette de l’album lui sollicitant un autographe. Et il a inscrit spontanément la phrase engagée que voici « TOUT BAGAY POSIB ».
Un petit sourire du bout de mes lèvres exprimait le dit de l’imperturbable optimiste qu’il est et le non dit d’une idéaliste... Je lui ai signifié toute ma satisfaction en poursuivant ma rafale de questions.
Q- Luck, sachant la formidable soutenance que tu avais accordée au Mois de la langue créole à sa deuxième édition. Sans oublier la sortie d’un album dont TI MARI est la grande vedette. A la même époque, cette année encore tu nous présentes une nouvelle création, peut-on ambitionné une accoutumance ?-
R- Puisque tu me poses la question, je t’annonce en primeur qu’il y aura effectivement l’année prochaine un TI PEYI A 2.
Puis-je me permettre de te poser une question délicate ?
R- vas-y, je t’écoute.
Q- Ton frère, Pierre Mervil semble évolué dans l’ombre de son grand frère, pourtant j’ai eu la chance de le côtoyer, il a du talent. Mais il ne fait que t’accompagner ici et là n’est-ce pas la manifestation d’une peur de ne pas être à ta hauteur ?
R- Pas du tout, comparativement à moi, mon frère a commencé très tard dans la musique. Présentement, il travaille à son rythme sur un album. Je lui ai procuré tout ce qui est nécessaire pour y parvenir. Après tout, on est orphelin de père et c’est moi désormais qui assume ce rôle. Je suis très exigeant envers lui cela ne veut pas dire pour autant que je lui impose quoi que ce soit. Je souhaite simplement qu’il réalise quelque chose dont il sera personnellement fier. Je suis un guide pour lui, son mentor. Déclarations que Pierre a corroboré plus tard en soirée en ajoutant que l’album est prévu sans faute pour 2005. Il chantera une chanson avec John Raphaël. Une réalisation qui reflètera la nouvelle génération et sera soupoudrée de rythmes R & B, Hip Pop et Ragea. Il tachera d’aborder avec sérieux les thèmes urbains comme le ghetto. Pas moyen de lui soutirer une date précise. Il préfère attendre que la poussière du CD de Luck retombe avant d’envisager la promotion du sien a-t-il affirmé. L’heure de monter sur scène s’approchait et je lui ai lancé une dernière question pour le libérer.
Q- Indépendamment de la popularité d’un chanteur comme toi, qu’est-ce cela prend pour être un porte-parole d’un événement tel que du Mois de la Langue Créole ?
R- Du cœur au ventre, de la passion mais par-dessus tout, le concours des MÉDIAS. Le média est un mal nécessaire, un passage obligé pour toute personne qui a quelque chose à partager, à dire. Je te signale que cela prend toujours une seule personne pour modifier le cours des choses, pour changer la face du monde. En autant que les autres lui accordent l’attention nécessaire, l’écoutent et décident de la suivre.
AGRÉABLE SURPRISE
Une demie heure plus tard, c’est un artiste sensuel, voluptueux à faire rougir les plus fringants des machos, enflammé qui est rentré sur scène et qui a rapidement envoûté l’assistance dans un air de zouk love de la chanson VIN DANSE. L’atmosphère endiablé faisait penser au dramaturge William Shakespeare dans la pièce LA TEMPÊTE : « L’enfer est vide car tous les diables sont ici ». J’ajouterai pour la circonstance, que tous les bons vieux diables étaient présents. Il viendra toujours en tête de ceux qui prendront le temps d’écouter attentivement les jolies métaphores de chaque plage l’esprit d’envie, de soif et de gourmandise qui caractérise l’album. On se doute qu’il s’agit là d’un appétit qui dévore exclusivement le corps, des sens éveillés, le tissage du rapport d’intimité et de sensualité « Mete lang ou sou myèl mwen... Si mwen grangou ou nan ka... M moulen kon sa ». D’ailleurs, le compositeur y croit si fort qu’il a proposé au québécois de solutionner le problème de la natalité qui perdure au Québec en adoptant le compas qui, on le sait, à l’irrespirable et la mystérieuse propriété aphrodisiaque. Une variété de mélodies allant du troubadour au jazz brésilien qui s’apparente au style imposant d’un autre artiste talentueux, Beethova Oba.
Luck Mervil s’est transformé en bête de scène et a donné le meilleur de lui-même accompagné de choristes, de musiciens emballés et professionnels à ce spectacle bénéfice dont tous les profits seront versés aux l’organismes CECI- Urgence Haïti et à Médecin du Monde. ( www.ceci.ca ou info@ceci.ca . Un spectacle sans entracte, du plaisir jusqu’au délire. Plusieurs artistes qui assistaient à la représentation ont été invités à monter sur scène pour clôturer la soirée. Parmi lesquels : Michel Mambara, Yanick Dutelly, Dan Dodz, la chanteuse Senaya. On a apprécié encore une fois Barbara Guillaume dans une interprétation de chanson racine totalement abandonnée qu’on dirait qu’elle était en transe. Yanick Joseph, artiste et bénévole surnommée la diva du mois de la langue créole pour son dévouement et son entière implication a pris d’asseau l’estrade en exécutant une danse samba provocatrice avec Luck, ceci a eu l’effet de survolter davantage le public unanimement satisfait de cette performance. Soit dit en passant, je n’ai jamais vu le coordonnateur du mois créole, M. Pierre Roland Bain consommé ou consumé autant de joie, d’amusement au sein d’une activité entourant cette festivité populaire !
Personnellement, je garde jalousement en mémoire cette pincée d’insouciance des uns et des autres au cours du spectacle qui a su plaire énormément. Je vous suggère de vous escorter de deux chansons particulièrement sur l’album, l’une en enrobée de velours : VIN DANSE et l’autre toute en satin rose : LE GOÛT DES JEUNES FILLES trame sonore du film de DANY LAFÉRRIERE.
Marie Flore DOMOND / CE